Autrefois marginal, les « ruptures » de médicaments ont pris une certaine ampleur, ces dernières années comme l’a montré l’affaire du Levothyrox en Juin 2013. Le phénomène des ruptures est d’ailleurs mondial et n’épargne aucun pays.
Les derniers bilans dressés par l’ANSM montrent une augmentation régulière des ruptures et des risques de rupture en produits indispensables ces dernières années : 44 en 2008, 173 en 2012, et plus de 200 en 2013. Les catégories les plus concernées sont les médicaments du système nerveux (18%), les anti-infectieux (17%) et les anticancéreux (11%).
Bien que 95% des médicaments vendus en pharmacie soient disponibles le jour-même en France, près d’un tiers des français interrogés par IPSOS en février 2014 dans le cadre de l’Observatoire sociétal du médicament du LEEM perçoivent les ruptures d’approvisionnement dans les pharmacies comme une menace pour leur santé.
Qu’en est-il en réalité ?
Derrière le terme de « ruptures » se cache en réalité deux situations : des ruptures de stock chez le fabricant ou des ruptures d’approvisionnement au niveau de la chaine de distribution même si dans les deux cas elle aboutit à la non-délivrance du médicament au patient.
La rupture de stock a de multiples origines, à commencer par l’externalisation massive de la production des matières premières à usage pharmaceutique. On estime aujourd’hui que 60 à 80% des matières premières sont fabriquées hors de l’Union Européenne. Cette proportion était de 20%, il y a 30 ans. Selon l’EMA (Agence européenne du médicament), la Chine produit 52,9% des principes actifs pharmaceutiques, l’Inde 22,2%, Israël 17,7%. Pour Isabelle Adenot, présidente de l’Ordre National des pharmaciens, "la mondialisation de la fabrication des médicaments est pour beaucoup dans cette accélération des ruptures.
La rupture d’approvisionnement, quant à elle, découle d’une défaillance d’un ou de plusieurs maillons de la chaîne de distribution, que ce soit les fabricants, les dépositaires, les grossistes répartiteurs ou les centrales d’achats de médicaments.
Selon les statistiques du Ministère de la santé, Les hôpitaux publics et privés achètent 95% de leurs médicaments directement auprès des fabricants ou de leurs dépositaires, dans le cadre d’une procédure d’appel d’offre régie par le code des marchés publics. Le circuit de distribution en officine est quant à lui largement dépendant des grossistes répartiteurs, les pharmacies d’officine leur achetant 80% des médicaments qu’elles dispensent.
Les grossistes répartiteurs sont légalement tenus de disposer de 15 jours de stocks. Cependant, une erreur de planification venant d’un ou de plusieurs de leurs 181 centres répartis en France peut provoquer une rupture d’approvisionnement en officine. La rupture d’approvisionnement peut aussi trouver sa cause dans les exportations parallèles de médicaments à destination de pays où ils sont vendus plus chers.
Une enquête du Leem a montré que les ruptures déclarées à l’ANSM ont concerné à hauteur de 28% les médicaments dits indispensables et à 72% des médicaments moins indispensables. Elle a aussi montré que toutes les classes de médicaments sont potentiellement touchées. Les médicaments administrés par voie orale ou injectable sont les plus souvent concernés par des risques de rupture, mais ce sont aussi les médicaments les plus courants dans l’arsenal thérapeutique des maladies les plus graves
Selon les chiffres fournis par l’ANSM, les ruptures de stock concernent un peu plus les médicaments dispensés à l’hôpital (32%) que les médicaments de ville (27%). Les ruptures peuvent bien entendu concerner à la fois la ville et l’hôpital.
Un dispositif de prévention des ruptures.
Un dispositif de prévention des ruptures a été mis en place par un décret 28 septembre 2012. Ce texte qui définit la rupture « comme l’incapacité pour une pharmacie d’officine ou une pharmacie à usage intérieur définie à l’article L. 5126-1 de dispenser un médicament à un patient dans un délai de 72 heures… » est venu officialiser et renforcer ce que les industriels avaient déjà mis en place pour gérer les ruptures ou les risques de ruptures, comme :
La mise en place d’un centre d’appel d’urgence accessible aux pharmaciens d’officine, aux pharmaciens d’hôpital et aux délégués des grossistes-répartiteurs
l’obligation d’informer l’ANSM, pour anticiper une situation de rupture potentielle ou traiter une rupture
Le dépannage d’urgence.
Les industriels se sont également dotés des moyens nécessaires pour prévenir et traiter ces « ruptures ». L’ordre national des pharmaciens a apporté également sa contribution en expérimentant un projet pilote de « DPruptures » sur 300 pharmacies à partir de Septembre 2013.
Affaire à suivre…
Télécharger le dossier de presse :
http://adexsol.com/IMG/pdf/dossier_ruptures_20mai-2.pdf