Réunie lundi 1er février le comité d’urgence de l’OMS vient de considérer l’épidémie de Zika qui sévit actuellement en Amérique du Sud comme « une urgence de santé publique de portée mondiale ». Le virus se propage, en effet, « de manière explosive » dans la région des Amériques, avec 3 à 4 millions de cas attendus en 2016. L’épidémie touche aussi les départements français d’Amérique et notamment la Martinique et la Guyane qui viennent de franchir le seuil épidémique, respectivement les 20 et 22 janvier 2016. S’agit-il d’un excès de précaution ou faut-il réellement s’en inquiéter ?
Le virus Zika
Le virus Zika appartient à la famille des Flaviviridae du genre Flavivirus comme ceux de la dengue et de la fièvre jaune. Ce virus a été isolé pour la première fois d’un singe Rhésus en 1947 en Ouganda dans la forêt Zika, d’où son nom. Isolé chez l’homme en 1952 en Ouganda et en Tanzanie, le virus a émergé récemment provoquant quatre grandes épidémies : en Micronésie sur l’ile de Yap en 2007, en Polynésie française en octobre 2013, en Nouvelle Calédonie en janvier 2014 et au Brésil en mai 2015 ou on compte aujourd’hui 1,5 million de cas.
Le virus se transmet presque exclusivement par des piqures de moustiques du genre Aedes. D’autres voies de transmission, très rares et imparfaitement documentées, ne sont pas exclure : deux à trois cas de contamination sexuelle ont été rapportés aux US. Deux cas de transmission périnatale ont été décrits lors de l’épidémie en Polynésie française. De même une contamination par transfusion sanguine ne peut être totalement écartée.
Symptômes et traitements
Dans 70 à 80% des cas, la maladie provoque peu de symptômes ou même l’absence de symptôme. L’évolution est le plus souvent rapidement favorable avec une guérison spontanée. Les symptômes qui apparaissent sont le plus souvent de type grippal (fièvre, maux de tête, courbatures) avec des éruptions cutanées et se manifestent dans les 3 à 12 jours qui suivent la piqûre par le moustique. Le Zika peut également se manifester par une conjonctivite ou par une douleur derrière les yeux, ainsi que par un œdème des mains et/ou des pieds.
Il n’y a pas de traitement antiviral spécifique. Un traitement symptomatique est, en revanche, recommandé sous la forme d’antalgiques contre la douleur et la fièvre du type paracétamol. Les anti-inflammatoires ne sont pas indiqués. « Il n’y aura probablement pas de vaccin sûr et efficace contre le virus Zika avant plusieurs années », a estimé le directeur de l’Institut américain des allergies et maladies infectieuses (NIAID). D’autres évoquent l’hypothèse futuriste du recours à des moustiques génétiquement modifiés comme pour le paludisme. Tout cela n’est pas pour demain !
Si l’épidémie inquiète, c’est surtout en raison de deux types de complications qui ont été décrites : des malformations congénitales et des complications neurologiques, dont le syndrome de Guillain-Barré
En octobre 2015, les autorités sanitaires brésiliennes ont, en effet, constaté une augmentation inhabituelle de cas de microcéphalie chez les nouveau-nés (taille anormalement petite du crâne). Depuis, 270 cas confirmés de microcéphalie et 3448 cas suspects ont été enregistrés, contre 147 en 2014. Des investigations épidémiologiques sont en cours afin de confirmer l’association possible entre ces effets et le virus Zika. Par précaution, la Colombie, le Salvador, l’Equateur, le Brésil, la Jamaïque et Porto Rico ont d’ores et déjà recommandé aux femmes d’éviter toute grossesse tant que l’épidémie de Zika n’était pas sous contrôle.
En juillet 2015, les autorités sanitaires brésiliennes ont aussi signalé 76 patients infectés par le virus présentaient des troubles neurologiques, dont 55% ont été confirmés en tant que syndrome de Guillain-Barré.
Les recommandations du Ministère de la santé
Le Ministère de la santé recommande un certain nombre de précautions à l’intention des résidents et voyageurs se rendant dans les pays où sévit le virus. Ils doivent notamment prendre des mesures de protection individuelle durant les heures d’activité des moustiques, en l’occurrence le matin et en fin de journée (port de vêtement longs couvrant les bras et les jambes jusqu’aux chevilles, si possible imprégnés de répulsif, moustiquaires imprégnées dans l’habitat…)
Il est aussi recommandé aux femmes enceintes de consulter leur médecin pour assurer la prévention et le suivi de leur grossesse. Le ministère recommande même un report de leur voyage à celles qui souhaitent se rendre à Saint-Martin, dans les départements français d’Amérique (Guyane, Martinique, Guadeloupe) ou dans les pays où sévit le Zika, une recommandation jugée excessive par la ministre des Outre-Mer George Pau-Langevin !
Afin d’éviter tout risque de contamination sexuelle, les autorités britanniques et irlandaises viennent de recommander le port du préservatif pour le partenaire masculin d’une femme enceinte ou ayant un projet de grossesse lorsqu’il est ou a été exposé au Zika. Le conseil national professionnel de la gynécologique obstétrique va dans le même sens et recommande « l’emploi du préservatif pour les femmes enceintes ou en âge de procréer en zones d’endémie, ou dont le compagnon est suspect d’être infecté ».
Par ailleurs et à titre conservatoire en attendant les résultats des discussions au sein de l’OMS, l’Agence de la Biomédecine (ABM) vient d’adresser aux établissements de santé des départements français d’Amérique, la recommandation de différer les dons de gamètes et les assistances médicales à la procréation (AMP). S’agissant de personnes qui reviendraient en métropole après un séjour dans l’un des territoires concernés, l’ABM recommande de différer les dons de gamètes et les assistances médicales à la procréation (AMP) sur une période de 28 jours après le retour et la réalisation d’un examen du sperme.
L’épidémie peut-elle atteindre la France métropolitaine ? Un bilan de L’Institut de veille sanitaire a identifié 9 voyageurs ayant contracté le Zika dans une zone touchée et rentrés en métropole dont l’un d’entre eux présente une forme neurologique.
Peut-on assister à des cas autochtones ainsi que cela a été le cas pour la dengue ou le chikungunya ? « Les conditions pour une transmission autochtone du virus Zika en métropole sont réunies » selon le Haut Comité de la Santé Publique (HCSP) dans un rapport de juillet 2015. Rappelons que le moustique sévit aujourd’hui dans 20 départements.
La période hivernale nous protège aujourd’hui de risque de transmission du virus Zika en métropole car la période d’activité des moustiques vecteurs du virus est comprise entre mai et novembre !