Le traitement hormonal de la ménopause (THM) n’augmente pas la mortalité globale, la mortalité cardio-vasculaire ou la mortalité par cancer, telles sont les conclusions d’une étude qui vient de paraitre dans le Journal of the American Medical Association. Des résultats qui reviennent sur ceux qui avaient remis en cause l’utilisation du THM en 2002.
La WHI (Women’s Health Initiative) est un vaste protocole américain randomisé en double aveugle contre placebo. Il comportait 2 études : la première comparant la prise d’œstrogènes équins conjugués (CEE) et d’acétate de médroxyprogestérone (MPA) avec un placebo ; la seconde, pour des femmes ayant eu une hystérectomie, comparant la prise de CEE seuls avec un placebo.
Prévue initialement sur une durée de 8,5 ans, la première étude a été arrêtée au bout de 5,2 ans à cause d’un sur-risque de cancer du sein, et la seconde au bout de 7,1 ans à cause d’un sur-risque d’AVC. Les résultats publiés en 2002 (1) ont eu un effet dévastateur sur l’utilisation des THM. Rappelons, qu’en France, seules 8% des femmes ménopausées sont aujourd’hui traitées alors que ce chiffre était de 35% au moment de l’étude.
Les conclusions de cette étude WHI ont, dès le départ, suscité des réserves en raison de l’âge des femmes incluses : 66% d’entre elles avaient plus de 60 ans et plus de 63% étaient ménopausées depuis plus de 10 ans. Les réserves concernaient également les molécules utilisées et leurs modes d’administration.
Diverses études postérieures sont venues nuancer ces conclusions sans que cela n’influe sur la pratique médicale désormais réticente à la prescription d’un THM.
Le suivi des femmes incluses dans l’étude WHI s’est cependant poursuivie jusqu’en 2014 et apporte, cette fois-ci, des résultats plutôt rassurants (2). 23347 femmes ont ainsi été surveillées 18 ans.
La mortalité totale a été de 27,1% dans le groupe sous THM versus 27,6% dans celui sous placebo, la mortalité cardiovasculaire de 8,9% sous THM versus 9% sous placebo, la mortalité par cancer de 8,2% versus 8% et la mortalité d’autres causes de 10% versus 10,7%. Un bilan neutre.
Le résultat le plus important de cette étude a concerné le groupe des femmes ayant débuté leur traitement entre 50 et 59 ans chez lesquelles la mortalité globale est même diminuée de 31% par rapport au placébo. Une baisse très significative !
Pour le Pr Patrice Lopes, qui préside le GEMVI (Groupe d’Etudes sur la Ménopause et le Vieillissement Hormonal), « si certains THM présentent des risques chez certaines femmes, il est temps de reconsidérer le bénéfice des THM surtout chez les femmes âgées de 50 à 59 ans qui ont trop peur de prendre ces traitements »
Cela d’autant que l’arrêt des prescriptions des THM après le tsunami de 2002 a augmenté de manière considérable le risque cardio-vasculaire. Aujourd’hui, les femmes meurent beaucoup plus de maladies cardio-vasculaires que de cancer. « Les résultats de l’étude WH de 2017 montre que le THM n’augmente pas le risque cardiovasculaire, il a probablement un effet préventif sur le plan artériel s’il est administré dans les 10 années suivant l’installation de la ménopause » précise le Dr Brigitte Letombe (CHU Lille).
Il faut retenir, en conclusion, que « non seulement le THM n’augmente pas la mortalité mais ce traitement assure une diminution de la mortalité chez les femmes en début de ménopause » selon le Dr Florence Tremolières (CHU de Toulouse). Ce médecin qui dirige le seul centre de ménopause existant en France préconise qu’à l’installation de la ménopause, toute femme bénéficie d’une consultation spécifique destinée à apprécier ses facteurs de risques personnels et familiaux tant au plan osseux que cardiovasculaire avec en particulier un examen d’ostéodensitométrie.
1 - Writing Group for the Women’s Health Initiative Investigators.Risks and benefits of estrogen plus progestin in healthy postmenopausal women. Principal results for the Women’s Health Initiative. Randomized control trial JAMA 2002 ;228:3:321-33
2 - Manson JA, Aragaki AK, Rossouw JE et al. Menopausal hormone therapy and long term all cause and cause specific mortality. The Women’s Health Initiative randomized trials, JAMA 2017 ; 318:927-38